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Ludopédagogie : l’apprentissage autrement, au cœur des pratiques qualité

Gregory Cousyn

June 26, 2025

Temps de lecture :

5 minutes

Un groupe de personnes assises en cercle, souriant et échangeant des poignées de main dans une ambiance collaborative et joyeuse.
Médico-social / Social

Le pari de la ludopédagogie, c’est d’aborder la qualité autrement par l’expérience partagée, le jeu et l’apprentissage actif

Dans les ESSMS, où les exigences en matière de qualité et d'amélioration continue sont croissantes, la ludopédagogie ouvre un espace concret pour impliquer les équipes, faire vivre les référentiels sur le terrain et nourrir une culture qualité plus incarnée.

L’idée de cet article a été initié et enrichi par Stéphanie Deroubaix, évaluatrice ESSMS, formatrice et fondatrice de QUERRE. Merci à vous Stéphanie !

La ludopédagogie, c'est quoi ?

La ludopédagogie consiste à utiliser des activités ludiques dans une visée pédagogique. Elle repose sur un principe simple : apprendre en s’amusant. On n'y joue pas pour jouer, mais pour stimuler l’engagement, l’appropriation, la mémorisation.

Elle s’appuie sur des bases solides :

  • Théories de l’apprentissage actif (constructivisme, interactionnisme) : on apprend mieux en agissant, en expérimentant.

  • Travaux en neurosciences (Stanislas Dehaene) : l’engagement actif, le plaisir, l’erreur et le retour sur expérience sont des piliers d’un apprentissage durable.

  • Psychologie cognitive et motivation (Deci & Ryan, Mihaly Csikszentmihalyi) : le jeu favorise la motivation intrinsèque, essentielle pour l’adulte apprenant.

Les ingrédients clés d’une activité ludopédagogique :

  • Liberté et sécurité : le cadre ludique autorise l’essai-erreur, sans jugement.

  • Interactions sociales : le jeu est souvent collectif et soutient la coopération.

  • Règles claires et objectifs motivants : sinon il s’agit d’une animation, pas d’un jeu pédagogique.

Un débriefing systématique : pour transformer le vécu en apprentissage conscient.

Exemples de formats ludo-pédagogiques

  • Jeux de rôle encadrés : à condition de poser des règles claires (cadre sécurisant, droit à l’erreur, objectifs définis), ils permettent d’explorer les postures professionnelles et les situations relationnelles sensibles. Le débriefing est essentiel pour transformer l’expérience en apprentissage.
  • Serious games numériques pour simuler des prises de décision.
  • Escape games pour revisiter de façon ludique des protocoles ou référentiels.
  • Jeux-cadres de Thiagi ou autres ateliers d’intelligence collective, adaptables à tous types de thèmes (bientraitance, gestion des risques, etc.) → Voir les Fiches ateliers de Stéphanie Deroubaix ici.
  • Les jeux de placement, les jeux de cartes, pour dédramatiser.

En bref, la ludopédagogie transforme une situation d’apprentissage en une expérience engageante, porteuse de sens et de lien. Elle ne se substitue pas à d’autres méthodes : elle les complète en redonnant envie d'apprendre et de s'impliquer collectivement.

Quelles conditions pour qu’un jeu pédagogique fonctionne dans les ESSMS ? 

Le jeu a toute sa place dans les établissements sociaux et médico-sociaux. Il parle à l’humain, il crée du lien, il donne du sens. Mais pour qu’il fonctionne vraiment en formation, quelques conditions doivent être réunies.

D’abord, le jeu installe un climat de confiance. En sortant du cadre habituel, il permet d’aborder des sujets parfois sensibles — comme la bientraitance ou les erreurs — de manière plus libre, moins formelle. 

Ensuite, il renforce la dynamique de groupe. En jouant ensemble, on coopère, on se découvre autrement, on construit une réponse collective. C’est une façon concrète de nourrir la cohésion d’équipe.

Le jeu, c’est aussi du plaisir et de l’émotion. Rire, se surprendre, relever un défi… Ce sont des émotions positives qui marquent les esprits et qui aident à retenir l’essentiel.

Autre point clé : dans un quotidien souvent sous tension, le jeu offre une pause utile. Un moment à la fois structuré et respirant, où les professionnels peuvent souffler tout en apprenant.

Enfin, le jeu donne la main aux équipes. On ne subit plus une formation descendante : on expérimente, on interagit, on construit ensemble. Et c’est là que les messages prennent tout leur sens.

Un outil au service de l'amélioration continue de la qualité 

La qualité ne doit pas rester l'affaire des experts ou des cadres. La ludopédagogie peut devenir un véritable levier pour démocratiser la culture de l'amélioration continue dans tous les services d'un ESSMS.

Voici ses apports clés :

  • Dramatiser les enjeux de la qualité : le jeu rend les thématiques plus accessibles et compréhensibles pour tous.
  • Renforcer l’acculturation progressive : des formats courts, réguliers, conviviaux ancrent naturellement les principes qualité dans les pratiques.
  • Impliquer tous les métiers : soignants, agents hôteliers, personnels administratifs… tout le monde peut apprendre et contribuer.
  • Valoriser les savoirs de terrain : les jeux bien conçus intègrent des cas réels, des retours d’expérience, les réflexions du quotidien.
  • Initier des changements de posture : sur les risques, les droits des usagers, la bientraitance…
  • Marquer les esprits : une activité bien animée, émotionnellement engageante, laisse une empreinte durable. Ce qui a été vécu est mieux retenu et plus facilement réinvesti.

C’est un excellent outil pour accompagner de nouvelles pratiques ou la préparation à une évaluation.

Concrètement, comment faire de la ludopédagogie ?

Pas besoin de budget pharaonique ou de technologie avancée. L’essentiel, c’est de créer un moment apprenant et engageant.

Quelques idées simples :

  • Un quiz “bientraitance” intégré à un défi interservices : c’est la dynamique de jeu (chrono, points, mini-compétition) qui va le rendre vivant, motivant… et mémorable.
  • Jeu de cartes “signalements” : classer les situations selon leur gravité, débattre, proposer des réponses adaptées.
  • Jeu de rôle : rejouer des situations tendues ou conflictuelles avec les familles ou entre collègues.
  • Olympiades qualité : défis collaboratifs autour de la sécurité, de l’hygiène ou de la relation d’aide.
  • Ateliers avec jeux-cadres de Thiagi : adaptables à tout sujet, très faciles à animer.

En savoir plus sur les jeux-cadres de Thiagi

Inventé par Sivasailam Thiagarajan, formateur de renommée internationale, le jeu-cadre est une structure de jeu prête à l’emploi, dans laquelle on insère le contenu de son choix. 

Modulable, rapide à mettre en œuvre et hautement engageant, il s’adapte à tous les thèmes, tous les publics et toutes les tailles de groupe, de la réunion d’équipe au séminaire.

Quelques conseils pratiques :

  • Impliquer les équipes dès la conception du jeu
  • Donner un objectif clair à chaque séquence
  • Prévoir un temps de débriefing pour ancrer les apprentissages
  • Adapter la durée et le niveau selon le public.

Le jeu devient alors un vrai outil de dialogue, de cohésion et d’amélioration des pratiques.

Quelles sont les limites de l’apprentissage par le jeu ?

Comme tout outil, la ludopédagogie a ses forces et ses limites. Bien utilisée, elle peut être très puissante. Mal adaptée, elle peut être contre-productive.

Voici quelques points de vigilance à garder en tête :

  • Il doit servir un objectif pédagogique clair : un jeu sans intention précise risque de disperser l’attention ou de passer à côté de l’essentiel. Avant d’animer une activité ludique, il est indispensable de se poser la question : qu’est-ce que je veux que les participants retiennent, expérimentent ou s’approprient ?
  • Le jeu n'est pas une fin en soi : il ne s'agit pas de jouer pour jouer, mais bien d'apprendre, de réfléchir, de faire émerger des prises de conscience.
  • Attention à l'effet "gadget" : un jeu mal conçu ou mal introduit peut être perçu comme infantilisant, voire contre-productif pour des professionnels expérimentés.
  • L'animation est clé : un bon jeu sans un bon animateur peut perdre tout son potentiel. Le débriefing, surtout, est indispensable pour transformer l'expérience ludique en apprentissage.
  • Adapter au public : certains professionnels peuvent être réticents ou peu familiers avec le jeu. Il faut alors proposer une entrée en matière douce, rassurante, et montrer la valeur ajoutée.

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À propos de l’auteur

Gregory Cousyn

Grégory occupe le poste de Head of Customer Care & Quality chez Qualineo. Son parcours : ancien infirmier diplômé d’état ayant travaillé pour le Ministère des Armées, Grégory Cousyn intègre un établissement de santé où il occupait un poste de direction. Son expérience s’articule autour de l’optimisation des organisations pour développer les performances et l’activité d’un établissement, l’appui à la stratégie et la gestion de projets.