L’amendement Creton permet à certains jeunes adultes en situation de handicap de rester temporairement dans un établissement d’éducation spéciale pour enfants après l’âge de 20 ans.
Un rapport remis à la ministre déléguée au Handicap en juin 2025, propose d’en rénover les modalités, soulignant les tensions croissantes dans les établissements pour enfants et les difficultés de transition vers le secteur adulte.
Dans cet article, nous revenons sur les règles d’application de l’amendement Creton : conditions d’éligibilité, démarches administratives, prise en charge financière, rôle de la CDAPH, ainsi que les points de vigilance à connaître pour les professionnels accompagnant ces transitions.
L’amendement Creton : de quoi parle-t-on ?
L’amendement Creton désigne une disposition juridique issue de la loi n° 89-18 du 13 janvier 1989. Elle permet à des jeunes adultes en situation de handicap de rester temporairement dans leur établissement d’éducation spéciale (de type IME) au-delà de l’âge limite réglementaire de 20 ans.
Ce maintien n’est pas un droit automatique, mais une solution transitoire destinée à éviter toute rupture de prise en charge lorsque aucune place n’est encore disponible dans un établissement pour adultes (ESAT, EAM, FAM, etc.).
Autrement dit, le dispositif vise à garantir une continuité d’accompagnement pour les jeunes qui, faute de solution adaptée, ne peuvent pas immédiatement intégrer une structure pour adultes relevant de leur orientation CDAPH (Commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées).
Ce maintien est strictement encadré par des critères et des modalités précises, tant du point de vue administratif que financier. Il repose sur une décision de la CDAPH et fait l’objet d’une prise en charge des frais d’hébergement par l’aide sociale départementale, sous conditions.
C’est ce que nous allons détailler dans les sections suivantes.
Le cadre légal et administratif
Pour bien comprendre les mécanismes des amendements Creton, il est indispensable d’en situer les fondements juridiques et de décrypter le fonctionnement administratif qui régit leur application.
Un dispositif inscrit dans le Code de l’action sociale et des familles
Le dispositif repose principalement sur l’article L.242-4 du CASF, complété par des textes réglementaires comme l’article 22 de la loi n°89-18 du 13 janvier 1989, qui a formalisé ce droit temporaire au maintien dans les établissements pour enfants.
La CDAPH est l’autorité compétente pour rendre une décision d’orientation dans le cadre de l’amendement Creton. Elle peut ainsi autoriser le maintien provisoire du jeune adulte dans son établissement d’origine (souvent un IME) lorsque l’orientation vers un établissement pour adultes n’est pas encore réalisable.
La question du domicile de secours : un critère déterminant
Le financement de l’hébergement relève de l’aide sociale départementale, mais attention : c’est le département du domicile de secours (et non celui où se situe l’établissement) qui est compétent.
La notion de domicile de secours, détermine donc quel département est responsable de la prise en charge financière.
Ainsi, le règlement d’aide sociale applicable est celui du département d’origine de la personne, ce qui peut parfois entraîner des différences d’interprétation ou de conditions d’attribution selon les territoires.
Un dispositif transitoire, non pérenne
Enfin, il est important de rappeler que l’amendement Creton ne crée pas un droit à long terme. Il s’agit d’une solution temporaire, activée uniquement en l’absence de places disponibles dans les structures adultes correspondant à l’orientation CDAPH.
L’objectif est bien d’éviter les ruptures de parcours et non de créer une filière pérenne dans les établissements pour enfants.
Conditions d’éligibilité de l’amendement Creton
Pour qu’un jeune adulte puisse bénéficier de ce maintien temporaire en établissement d’éducation spéciale, il doit remplir à la fois des conditions personnelles et des conditions administratives liées au service d’accueil.
Critères liés à la personne
Pour bénéficier de l’amendement Creton, le jeune adulte doit répondre aux conditions suivantes :
- Avoir atteint l’âge de 20 ans ou plus (âge limite théorique des établissements pour enfants)
- Avoir reçu une décision d’orientation de la CDAPH vers un établissement médico-social pour adultes, tout en ayant une autorisation de maintien temporaire dans un établissement pour enfants ;
- Présenter une incapacité permanente d’au moins 80 %, ou un taux compris entre 50 % et 79 % avec une reconnaissance officielle de restriction substantielle et durable d’accès à l’emploi (RSDAE)
- Résider de manière stable et continue en France depuis plus de 3 mois ;
- Être de nationalité française ou étrangère en situation régulière, avec un titre de séjour valable
- Disposer de ressources insuffisantes pour financer lui-même ses frais d’hébergement.
- Justifier d’une recherche active de solution correspondant à l’orientation de la CDAPH, en cohérence avec le projet de vie de la personne.
Critères liés au service d’accueil
Le maintien dans un établissement d’enfants est également conditionné à l’habilitation de l’établissement par le président du conseil départemental.
Autrement dit, il ne suffit pas qu’un jeune réponde aux critères personnels : encore faut-il que l’établissement dans lequel il est accueilli, soit habilité à recevoir de l’aide sociale départementale pour ce type de prise en charge.
Procédure de demande et constitution du dossier
L’accès au dispositif des amendements Creton repose sur une procédure administrative encadrée qui nécessite de constituer un dossier complet et de respecter certains délais.
Voici les étapes clés à connaître pour les professionnels accompagnant les familles concernées.
Où retirer le dossier ?
Le dossier de demande d’aide sociale au titre de l’amendement Creton peut être retiré :
- auprès du CCAS (Centre communal d’action sociale) ou du CIAS du lieu de résidence du jeune adulte
- à la mairie
- ou dans un centre médico-social.
Il est également accessible en ligne sur le site du Département concerné