Les impayés en Ehpad peuvent rapidement fragiliser l’équilibre financier d’un établissement.
Entre démarches administratives complexes, dossiers d’aide sociale en attente et familles difficilement joignables, le recouvrement des frais de séjour exige une organisation rigoureuse.
Dans cet article, découvrez les bonnes pratiques pour anticiper les retards de paiement, structurer vos relances et sécuriser la gestion des impayés, tout en préservant la relation avec les résidents et leurs proches.
Sécuriser les frais de séjour dès l’entrée en Ehpad
Avant de parler de recouvrement, encore faut-il s’assurer que tout a été mis en place pour prévenir les impayés. En Ehpad, cette prévention commence dès l’admission du résident.
Formaliser un contrat de séjour clair et complet
La gestion des impayés commence bien avant la première facture : elle s’amorce en effet dès l’admission du résident. Le contrat de séjour est à ce titre un document fondamental, qui doit aller au-delà du simple cadre administratif. Il constitue la base sur laquelle repose toute action ultérieure de recouvrement.
Contrairement à un bail locatif, le contrat de séjour peut être rompu à tout moment. Cette souplesse juridique implique, en contrepartie, une vigilance accrue au moment de sa rédaction. Le contrat doit préciser clairement :
- Les conditions de facturation et de paiement
- Les recours en cas d’impayés
- et les modalités de rupture anticipée.
Un contrat incomplet ou imprécis devient un frein en cas de litige. Il est donc indispensable de le personnaliser selon la situation du résident, notamment si celui-ci est placé sous tutelle ou curatelle.
Vérifier la situation juridique et financière du résident
Avant de parler d’accueil, il faut s’assurer que toutes les dimensions juridiques et financières sont balisées. Cela passe par un échange approfondi avec la famille et la personne référente pour recueillir les éléments suivants :
- Les ressources et le patrimoine du résident (relevés, pensions, éventuelles dettes)
- Le nom du représentant légal (si mesure de protection)
- Les coordonnées complètes de la personne de confiance
- Le livret de famille et l’acte de naissance (utiles en cas de procédure auprès du juge),
- Les informations sur les obligés alimentaires (enfants, gendres, etc.).
Ne pas disposer de ces pièces au départ, c’est prendre le risque de devoir courir après dans l’urgence si une situation d’impayé survient.
Initier rapidement la demande d’aide sociale
Dans de nombreux cas, l’équilibre financier repose partiellement sur une participation du département. Pour en bénéficier, le résident ou sa famille doit déposer un dossier d’aide sociale. Cette démarche, souvent fastidieuse, doit être anticipée. Idéalement, le dossier doit être complété et transmis dans le mois suivant l’admission.
Trop souvent, les Ehpad attendent plusieurs mois avant de s’assurer que le dossier d’aide sociale a bien été déposé. Ce retard peut coûter cher :
- L’aide sociale n’est rétroactive qu’à partir de la date de dépôt du dossier (et non de l’entrée en établissement).
- Aucun effet automatique : les obligés alimentaires ne sont pas contraints de participer tant qu’aucune décision judiciaire n’a été rendue.
En cas d’inaction, la dette augmente… et finit par se prescrire. Il est donc stratégique de :
- Fixer un délai clair aux familles pour le dépôt du dossier (idéalement dans le mois suivant l’admission)
- Demander systématiquement un accusé de réception,
- conserver toutes les preuves d’échanges avec le Département et la famille.
Comprendre l’enjeu de la prescription : 24 mois et pas un de plus
Selon le Code de la consommation, les dettes liées à des prestations de services, y compris les frais de séjour en Ehpad, se prescrivent au bout de deux ans. Cela signifie que vous ne pourrez plus légalement en réclamer le paiement au-delà de ce délai. En pratique, cela implique une rigueur extrême dans :
- Le suivi des dates d’émission des factures
- La traçabilité des relances
- La constitution des pièces justificatives en cas de contentieux.
Une créance non réclamée ou mal relancée dans ce laps de temps devient irrécouvrable, même si elle est parfaitement fondée.
Comment relancer efficacement les résidents et obligés alimentaires ?
Lorsqu’un impayé est constaté, le premier réflexe ne doit pas être juridique. La voie amiable reste la plus rapide, la moins coûteuse et souvent la plus efficace. Mais encore faut-il qu’elle soit structurée, tracée et menée avec rigueur.
Structurer la relance amiable dès les premiers retards
Le temps joue contre vous. Plus vous attendez, plus la dette devient difficile à récupérer, surtout avec un délai de prescription aussi court. Pour éviter l’enlisement, adoptez une méthode progressive :
- Premier contact informel : par téléphone ou e-mail, il permet souvent de débloquer une situation liée à un simple oubli ou malentendu.
- Lettre de relance simple : adressée au résident et/ou à la famille, elle rappelle poliment le montant dû, l’échéance dépassée et propose une régularisation rapide.
- Mise en demeure par courrier recommandé avec accusé de réception (LRAR) : c’est une étape formelle indispensable. Elle marque un tournant dans le processus et prépare le terrain en cas de recours ultérieur.
Chaque étape doit être datée, tracée et archivée. Un tableau de suivi des relances avec les dates d’envoi et de réponse est un outil précieux pour justifier votre démarche si le dossier venait à être judiciarisé.
Identifier tous les interlocuteurs concernés
Un impayé ne concerne pas uniquement le résident. Il peut impliquer plusieurs acteurs :
- Le résident lui-même, s’il est autonome financièrement
- Le représentant légal, en cas de tutelle ou curatelle (organisme ou membre de la famille)
- La personne de confiance, qui peut faciliter le dialogue, même si elle n’a pas de pouvoir décisionnel
- Les obligés alimentaires : enfants, gendres, petits-enfants… la loi leur impose, sous conditions, une contribution financière.
Chaque partie doit être tenue informée du retard de paiement, dans un cadre clair et non conflictuel. L’objectif est de responsabiliser sans braquer.