Sanctions disciplinaires en santé et ESSMS : ce qu’il faut savoir


Dans le secteur de la santé et du médico-social, la question des sanctions disciplinaires est souvent source d’inquiétude. Elles concernent à la fois les professionnels de santé (médecins, infirmiers, pharmaciens, etc.) et les directeurs d’établissements (EHPAD, ESSMS, hôpitaux).
Ces mesures ne sont pas là pour « punir » mais pour garantir la sécurité des usagers, le respect de la déontologie et la qualité des services rendus.
Dans cet article, nous faisons le point sur les différents types de sanctions possibles et les conseils pour mieux prévenir ces situations.
Qu’est-ce qu’une sanction disciplinaire en santé et ESSMS ?
Lorsqu’on parle de sanctions disciplinaires dans le secteur sanitaire et médico-social, il est essentiel de comprendre ce que recouvre exactement ce terme. Dans l’imaginaire collectif, la sanction évoque souvent une « punition », parfois arbitraire.
Pourtant, en réalité, elle est encadrée par la loi, répond à une procédure stricte et poursuit un objectif clair : garantir la qualité et la sécurité des soins ou de l’accompagnement des personnes vulnérables.
Une mesure juridique encadrée
En droit, une sanction disciplinaire est une mesure prise par une autorité compétente — cela peut être :
- un employeur public (dans le cadre de la fonction publique hospitalière ou territoriale)
- un employeur privé (associations, fondations, entreprises gestionnaires d’ESSMS)
ou un ordre professionnel (par exemple l’Ordre des médecins, des infirmiers, des pharmaciens).
Elle est appliquée lorsqu’un manquement aux obligations professionnelles, déontologiques ou légales est constaté. Ces manquements peuvent aller de la simple négligence administrative (par exemple, un retard répété dans la transmission de documents) à des fautes graves susceptibles d’entraîner un danger pour les usagers (ex. : non-respect du secret professionnel, maltraitance, etc.).
Les objectifs des sanctions disciplinaires
Contrairement à l’idée d’une mesure punitive isolée, la sanction disciplinaire remplit plusieurs finalités :
1. Préserver la sécurité des usagers
Dans le médico-social comme dans le sanitaire, les personnes accompagnées sont souvent vulnérables. Toute défaillance, même mineure, peut avoir de lourdes conséquences. Les sanctions disciplinaires permettent de rappeler la responsabilité individuelle et collective en matière de sécurité.
2. Garantir la qualité et la confiance
Les établissements de santé et médico-sociaux sont des lieux où la confiance est primordiale. Les usagers, leurs familles et la société doivent pouvoir être assurés que les professionnels respectent des règles éthiques et professionnelles strictes.
3. Prévenir la récidive et inciter à l’amélioration
Une sanction n’est pas toujours une exclusion définitive. Souvent, elle vise à rappeler à l’ordre, à sensibiliser, et à inciter à corriger des pratiques. Ainsi, elle a une fonction préventive et pédagogique.
4. Maintenir l’équité et la justice
Enfin, la sanction disciplinaire vise à traiter tous les professionnels de façon équitable. Deux personnes ayant commis une faute comparable doivent être sanctionnées de manière similaire. C’est une question d’équité, mais aussi de crédibilité des institutions.
Distinction avec d’autres types de sanctions
Il est important de distinguer la sanction disciplinaire d’autres mesures parfois confondues avec elle :
- La sanction pénale : prononcée par un tribunal (ex. condamnation pour fraude, violences, mise en danger de la vie d’autrui). Elle relève du droit pénal. :
- La sanction civile : liée à une responsabilité contractuelle ou à des dommages causés (ex. indemnisation d’un patient ou d’une famille).
- La sanction administrative : décidée par une autorité de contrôle (ARS, préfet) à l’encontre d’un établissement, par exemple fermeture temporaire d’un service.
La sanction disciplinaire, elle, se situe dans la sphère professionnelle et vise un individu (un soignant, un directeur, un agent), en raison de manquements à ses obligations professionnelles.
Qui peut être concerné ?
Dans le secteur sanitaire et médico-social, tous les acteurs peuvent potentiellement être concernés :
- Les professionnels de santé : médecins, infirmiers, aides-soignants, pharmaciens, etc.
- Les professionnels du social et médico-social : éducateurs, psychologues, assistants sociaux, animateurs.
- Les directeurs d'établissement(EHPAD, ESSMS, hôpitaux, cliniques) : leur responsabilité peut être engagée sur des questions de gestion, de management, ou de sécurité des usagers.
Cette diversité explique la variété des instances compétentes : ordres professionnels, directions d’établissement, autorités de tutelle.
Les grands principes encadrant une sanction disciplinaire
Pour éviter tout arbitraire, plusieurs principes fondamentaux doivent être respectés :
- Principe de légalité : aucune sanction ne peut être prononcée si elle n’est pas prévue par un texte ou un règlement applicable.
- Principe de proportionnalité : la sanction doit être adaptée à la gravité des faits reprochés. Par exemple, une simple négligence administrative ne peut justifier une révocation.
- Principe du contradictoire : la personne mise en cause doit pouvoir prendre connaissance des griefs, consulter son dossier et présenter sa défense.
- Principe de motivation : la décision doit être expliquée et justifiée par des faits précis.
- Droit au recours : toute sanction peut être contestée devant une instance supérieure ou un juge.
Les sanctions pour les professionnels de santé
Les professionnels de santé (médecins, infirmiers, pharmaciens, kinésithérapeutes, etc.) sont soumis à des obligations déontologiques strictes. Pour en assurer le respect, chaque profession est encadrée par un ordre professionnel ou par l’autorité de l’employeur.
Les sanctions prononcées sont graduées : de l’avertissement au retrait définitif du droit d’exercer.
1. L’avertissement : une mise en garde officielle
C’est la sanction la plus légère. Elle consiste à rappeler fermement au professionnel ses obligations.
Conséquences
- Ne bloque pas la carrière du professionnel
- Reste inscrite dans son dossier disciplinaire et peut être prise en compte en cas de récidive.
Exemple : un infirmier reçoit un avertissement après avoir refusé ponctuellement d’appliquer une procédure de désinfection pourtant obligatoire, sans qu’il y ait eu mise en danger directe d’un patient.
2. Le blâme : une réprimande plus lourde
Le blâme est une sanction plus sévère que l’avertissement. Il marque une désapprobation officielle de l’autorité disciplinaire.
Conséquences
- Peut ralentir une évolution de carrière
- Demeure une sanction disciplinaire « visible » en cas de nouvelle procédure.
Exemple : un médecin sanctionné d’un blâme par l’Ordre pour avoir délivré publiquement des informations médicales sur un patient sans son consentement (violation ponctuelle du secret médical).
3. L’interdiction temporaire d’exercer (avec ou sans sursis)
Il s’agit d’une sanction intermédiaire, mais lourde, qui peut empêcher un professionnel de travailler pendant une durée déterminée. Elle peut être prononcée avec ou sans sursis.
Conséquences
- Suspension immédiate de l’activité pendant la durée fixée
- Peut être assortie d’un sursis (ex. : sanction de 12 mois, dont 6 mois fermes et 6 mois avec sursis)
- Impact fort sur la réputation et la carrière.
Exemple : deux pharmaciens ont été sanctionnés par 6 mois d’interdiction d’exercer, dont 4 mois avec sursis, pour avoir dispensé à l’unité des médicaments hors cadre réglementaire.
4. La radiation du tableau de l’Ordre
C’est la sanction la plus grave : elle entraîne la perte définitive du droit d’exercer la profession.
Conséquences
- Radiation définitive de l’Ordre
- Impossibilité d’exercer légalement la profession
- Parfois, cumul avec des sanctions pénales (condamnation par un tribunal).
Exemple : un médecin avait été condamné pénalement (par une cour d’appel) à une peine d’interdiction d’exercer la médecine pendant cinq ans. Par la suite, le conseil départemental de l’Ordre des médecins l’a radié du tableau de l’Ordre au motif qu’il ne remplissait plus la condition de moralité publique.
Les sanctions pour les directeurs d’établissements (EHPAD, ESSMS, hôpitaux)
Les directeurs d’établissement occupent une position particulière : ils sont garants de la sécurité des usagers, de la bonne gestion et du respect des droits. Leur rôle les expose donc aussi à des procédures disciplinaires lorsqu’un manquement est constaté.
Typologie des sanctions possibles
Selon leur statut (fonction publique hospitalière ou contrat privé), les sanctions peuvent varier, mais elles suivent toujours une logique de graduation :
1. L’avertissement ou le blâme
- Pour des manquements considérés comme mineurs : défaut de communication, erreurs de gestion sans conséquence grave
- Objectif : rappeler les règles et inciter à la correction des pratiques.
2. L’exclusion temporaire de fonctions
- Suspension de l’exercice de la fonction pendant une durée déterminée, souvent avec perte de rémunération
- Utilisée lorsqu’il y a des fautes de management ou de gestion plus sérieuses.
3. La rétrogradation ou l’abaissement d’échelon (dans la fonction publique)
- Sanction qui a un impact direct sur la carrière : perte de responsabilités, retour à un poste inférieur
- S’applique surtout dans la fonction publique hospitalière.
4. La révocation ou le licenciement
- Sanction la plus lourde
- Intervient en cas de faute grave : fraude financière, harcèlement, négligence grave vis-à-vis des résidents, manquements répétés malgré des rappels
- Dans le public, on parle de révocation ; dans le privé, de licenciement pour faute grave.
Comment prévenir le risque disciplinaire ?
Plutôt que de raisonner uniquement en termes de sanctions, il est plus constructif de penser prévention. Dans le secteur sanitaire et médico-social, une grande partie des procédures disciplinaires peuvent être évitées si certaines bonnes pratiques sont mises en place au quotidien.
Bonnes pratiques de gouvernance et management
- Favoriser une gouvernance claire, où les responsabilités de chacun sont bien définies
- Privilégier un management basé sur l’écoute, la confiance et la communication
- Associer les équipes aux décisions importantes, afin de renforcer l’adhésion et limiter les tensions.
Formation et information continue des équipes
- Proposer des formations régulières sur les obligations légales, la déontologie et les règles internes
- Mettre à jour les connaissances des équipes, en particulier sur les droits des usagers et la sécurité des soins
- Organiser des rappels pédagogiques (réunions, ateliers) pour maintenir la vigilance.
Gestion transparente des incidents et plaintes
- Encourager la déclaration des événements indésirables sans crainte de sanction immédiate
- Traiter les plaintes et signalements avec sérieux, en informant clairement les parties concernées des suites données
- Transformer chaque incident en opportunité d’amélioration plutôt qu’en recherche de coupable.
Mise en place de procédures internes claires
- Formaliser des procédures simples et accessibles pour encadrer les pratiques quotidienne
- S’assurer que tous les professionnels connaissent les protocoles (hygiène, sécurité, gestion des risques)
- Mettre à jour régulièrement les documents internes pour rester en conformité avec les évolutions réglementaires.
Cet article sur les sanctions disciplinaires vous a intéressé.e ? Restez informé.e des actualités de votre secteur en vous abonnant à notre newsletter

Gestion des événements indésirables : comment l’organiser en établissement ?




