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Nouveau directeur en ESSMS : comment diagnostiquer efficacement son établissement ?

Gregory Cousyn

July 2, 2025

Temps de lecture :

4 minutes

Un homme en costume et cravate, debout dans un bureau, examine des documents tout en regardant un écran d'ordinateur.
Médico-social / Social

Prendre la direction d’un établissement social ou médico-social, c’est un peu comme embarquer sur un navire en pleine mer sans avoir encore lu la carte. 

Vous arrivez, on vous confie les clés, l’équipe vous attend, les familles vous observent, l’ARS vous surveille. Et vous ? Vous devez agir vite, sans forcément tout connaître.

Par quoi commencer ? Que faut-il absolument vérifier les premières semaines ? Dans cet article, découvrez une méthode inspirée des contrôles ARS et de l’expérience vécue sur le terrain, pour prendre en main un établissement ESSMS étape par étape. 

Identifier les caractéristiques clés de l’établissement

Avant de parler d’organisation, un nouveau directeur doit comprendre les fondations de son établissement. Ce diagnostic de base donne les repères structurels et réglementaires nécessaires pour prendre des décisions éclairées dès les premières semaines.

Statut, cadre juridique et options tarifaires

Commencer par identifier les éléments de contexte :

  • Quel est le statut juridique de la structure ? (public, privé, associatif)
  • Quelle est l’option tarifaire choisie : globale ou partielle ?
  • Disposez-vous d’une Pharmacie à Usage Intérieur (PUI) ou d’un partenariat avec une officine de ville ?

Capacité d’accueil réelle versus autorisée

Il ne suffit pas de savoir combien de lits sont autorisés : il faut savoir combien sont réellement opérationnels aujourd’hui.

  • Combien de places en hébergement permanent ?
  • En hébergement temporaire, PASA, UHR, ou accueil de jour ?
  • Y a-t-il des places habilitées à l’aide sociale, et en quelle proportion ?

Le niveau de dépendance : GMP et PMP

Les deux indicateurs-clés à vérifier :

  • Le GMP (Groupe Iso-Ressources Moyen Pondéré), indicateur du niveau de dépendance physique
  • Le PMP (Pathos Moyen Pondéré), qui reflète la charge en soins médicaux

Ce qu’un nouveau directeur doit aussi regarder

  • Quelle est la situation géographique : isolée ? en tension démographique ? en zone de désert médical ?
  • Y a-t-il un bilan financier à jour ? Un niveau d’endettement ou de fragilité identifié ?
  • Comment se porte le climat social global (turnover, absentéisme, conflits, dialogue social…) ?
  • Le CPOM est-il en cours ? À renouveler ? Respecté dans ses objectifs ?

En résumé 

Cette première étape donne une photographie réaliste de l’établissement. Elle permet aussi de positionner vos priorités : régulariser une situation administrative, mobiliser les ressources pour une unité fermée, ou anticiper des changements dans le contrat pluriannuel.

Conseil : 

Regroupez toutes ces données dans un tableau de bord dès votre première semaine. Ce sera votre boussole pour les mois à venir.

Évaluer les ressources humaines

Pour un nouveau directeur, évaluer les ressources humaines consiste à comprendre comment les professionnels travaillent, vivent leur mission, et sont accompagnés au quotidien.

Les effectifs et l’organisation du travail

Commencer par dresser un état des lieux :

  • Quel est le nombre de professionnels présents par métier et par unité ?
  • Comment s’organisent les horaires, coupures, temps partiels ?
  • Existe-t-il un document formalisé pour la gestion des plannings et des absences ?
  • Quelles sont les procédures en cas d’absentéisme soudain ? (rappel de personnel, vacataires, intérim, mode dégradé)

La formation, levier clé de fidélisation

La formation est un bon indicateur du climat social et de la dynamique d’amélioration continue :

  • Un plan de formation externe est-il en cours d’exécution ? Existe-t-il un plan pour l’année suivante ?
  • Y a-t-il un calendrier de formations internes, avec des temps réguliers de transmission et d’échange ?
  • Les émargements et supports pédagogiques sont-ils bien archivés ?

Ce qu’un directeur doit aussi observer de près

  • Le climat social général : écoutez les signaux faibles (turnover, arrêts maladie, rumeurs)
  • La présence managériale : les cadres sont-ils visibles, soutenant, proches du terrain ?
  • Le degré d’autonomie et de coconstruction dans l’équipe : un bon management repose sur des procédures, mais aussi sur la capacité des équipes à se réorganiser ensemble.

En résumé : 

Les ressources humaines ne sont pas qu’un tableau Excel. C’est le cœur battant de votre établissement. 

Conseils

En tant que directeur, votre première mission est de sécuriser les fondamentaux (plannings, absences, formations) tout en créant un climat de confiance et de reconnaissance.

Gouvernance et pilotage : les bases sont-elles solides ?

Quand on prend la direction d’un ESSMS, évaluer la gouvernance, c’est vérifier que tout ce qui soutient l’établissement est bien en place : organisation, documentation, pilotage, relations institutionnelles.

Direction : vérifier la légitimité et la lisibilité du pilotage

Commencer par les bases :

  • L’organigramme est-il à jour, diffusé, compris des équipes ?
  • Votre contrat de travail ou arrêté de nomination est-il conforme ?
  • Disposez-vous d’un Document Unique de Délégation (DUD) pour exercer vos responsabilités ?
  • Un calendrier d’astreinte est-il formalisé, partagé et opérationnel ?

Fonctionnement institutionnel : les documents qui donnent le cap

Vérifier si les documents suivants existent, sont à jour et réellement utilisés :

Médecin coordonnateur et IDEC 

Ils assurent la coordination des soins au quotidien. Il s’agit de vérifier : 

  • Diplômes et contrats (incluant les ETP, fonctions exactes, responsabilités)
  • Pour le médecin coordonnateur : la mise en œuvre des 12 missions légales (article D. 312-158 du CASF)
  • Pour l’IDEC ou cadre de santé : présence effective, position dans l’organigramme, rôle dans l’équipe d’encadrement

Qualité et gestion des risques : un pilotage vivant ou figé ?

Il s’agit, dans cette section, de plonger dans le cœur du pilotage qualité :

  • Des réunions qualité ont-elles lieu régulièrement ? Avec des comptes-rendus utiles ?
  • Existe-t-il des RETEX (retours d’expérience) après chaque crise ou événement grave ?
  • Les professionnels sont-ils formés aux RBPP et au signalement des EIG ?
  • Une procédure formelle de déclaration des EIG (à l’ARS, CD, Préfecture) est-elle connue et suivie ?
  • Un tableau de suivi des EIG est-il disponible ? Et un bilan annuel sur la maltraitance ?

En résumé 

Une bonne gouvernance, c’est garantir un pilotage légitime, transparent et sécurisant pour les équipes, les personnes accompagnées et les partenaires.

Conseil 

Dès vos premières semaines, réunissez les cadres pour un état des lieux commun, et identifiez ensemble les zones à consolider. Gouverner, c’est aussi coconstruire le cap.

Prise en charge et soins : observer les pratiques

La mission de directeur est de vérifier que les soins sont cohérents, humains et sécurisés, dans le respect des réglementations et des attentes des personnes accueillies.

Projet médico-soignant et bonnes pratiques au quotidien

Une prise en charge adaptée à la population accueillie

  • Avez-vous une description claire de la population (âge, pathologies, autonomie, profils psycho-sociaux) ?
  • Le projet médical et de soins est-il en phase avec cette réalité de terrain ?
  • Les modalités d’admission sont-elles lisibles, équitables, sécurisées ?

Continuité et coordination des soins

  • Comment est organisée la permanence des soins la nuit, le week-end, les jours fériés ?
  • Les transmissions entre équipes sont-elles structurées et efficaces ?
  • Le circuit du médicament est-il sécurisé ? (procédures, traçabilité, informatisation)
  • Disposez-vous d’une PUI ou convention avec une pharmacie de ville ?

Communication et lien avec les proches

  • Quels sont les canaux de communication avec les familles ? (CVS, entretiens, emails, téléphone, affichage)
  • Sont-ils réellement utilisés et efficaces ?

Les procédures de bonnes pratiques gériatriques

Vérifier l’existence (et l’usage réel) des protocoles essentiels :

  • Risques infectieux, iatrogénie, chutes, troubles du comportement
  • Soins spécifiques : douleur, dénutrition, déshydratation, incontinence, escarres, fin de vie
  • Gestion des situations d’urgence et accès H24 aux soins non programmés (incluant le Dossier de Liaison d’Urgence)

Projet personnalisé et ouverture vers l’extérieur

Chaque personne accompagnée doit avoir un projet d’accompagnement personnalisé, construit avec lui et/ou ses proches, intégrant :

  • Ses souhaits et attentes
  • Les outils d’évaluation gériatriques utilisés (MMSE, Algoplus, Tinetti, etc.)
  • Des objectifs clairs, avec des actions et des ressources définies

Le réseau, un levier pour la qualité de vie

Un bon ESSMS est bien connecté à son territoire :

  • Partenariats formalisés avec : hôpitaux, psychiatrie, soins palliatifs, HAD, libéraux…
  • Utilisation active de la télémédecine et téléconsultation
  • Collaborations avec des intervenants en soins non médicamenteux : médiation animale, sophrologie, art-thérapie, etc.
  • Participation à des projets collectifs (astreinte IDE, numérique, soutien aux aidants…)

En résumé 

Diagnostiquer la qualité de la prise en charge, c’est regarder l’adéquation avec la population, la cohérence du projet, la sécurité, la relation humaine et les partenariats extérieurs.

Conseil 

Visitez les unités, participez à des transmissions, écoutez les équipes et les résidents. Vous verrez vite si les procédures sont réellement incarnées ou juste affichées.

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Questions fréquentes

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À propos de l’auteur

Gregory Cousyn

Grégory occupe le poste de Head of Customer Care & Quality chez Qualineo. Son parcours : ancien infirmier diplômé d’état ayant travaillé pour le Ministère des Armées, Grégory Cousyn intègre un établissement de santé où il occupait un poste de direction. Son expérience s’articule autour de l’optimisation des organisations pour développer les performances et l’activité d’un établissement, l’appui à la stratégie et la gestion de projets.